Résumé de l'intervention
M. RAFFIN.- Bonjour. Je suis Philippe Raffin, représentant du SNPL. Je suis capitaine sur A 320.
M. SCHMID.- Bonjour. Merci d'être avec nous. Je m'appelle Willem Schmid. Je suis capitaine chez KLM Régional.
Nous souhaiterions vous parler de notre collaboration, à notre niveau en tant que pilotes, depuis le rapprochement entre Air France et KLM. Nous souhaitons partager avec vous les protocoles qui ont été développés pour que notre collaboration puisse se faire de meilleure façon.
M. RAFFIN.- Nous vous présenterons le contexte, les intérêts de nos accords et notre point de vue.
La presse indique qu'Air France et KLM ont entrepris des négociations, des discussions en octobre 2003. Quelques semaines plus tard, nous avons reçu un appel de Henk de Vries qui, à l'époque, était le président du VNV, pour une réunion que nous avons tenue à Paris, dans une configuration assez particulière : deux collègues néerlandais et 5 syndicats français de pilotes !
M. SCHMID.- C'était quelque chose d'assez nouveau pour nous, pilotes néerlandais, que de venir en France parler de fusion, de rapprochement en tant que pilotes. Et Henk de Vries et ses collègues de VNV sont allés à un cours visant à mieux comprendre le comportement et la culture française, pour se préparer à rencontrer les syndicats français. L'idée, c'était comment appréhender ce rapprochement et comment mettre en place un protocole pour les pilotes.
M. RAFFIN.- Ce n'était pas simple mais en mars 2004, nous avons eu un premier protocole signé par VNV qu'un certain nombre de syndicats ont décidé de ne pas signer.
M. SCHMID.- Un deuxième protocole est arrivé un peu plus tard. Le protocole n° 1 était véritablement la fondation, le point de départ de notre travail en commun. Je vais reprendre les points saillants.
Tout d'abord, les syndicats reconnaissent que ce rapprochement apporte un certain nombre d'opportunités. Nous savions qu'il y avait des opportunités, des menaces également mais avec ce protocole, l'idée était de faire face à l'avenir, à la fois vis-à-vis des opportunités et des menaces.
M. RAFFIN.- Le risque étant d'utiliser la Holding comme un moyen pour affaiblir notre capacité de négociation. Nous ne voulions pas que la Direction utilise un groupe de pilotes pour le monter contre un autre groupe de pilotes.
M. SCHMID.- Il s'agissait également de répondre aux attentes de nos membres, qui nous ont élus, qui ont voté pour nous. Il fallait que chaque pilote puisse avoir le meilleur futur possible. L'idée était véritablement d'avoir un contrat solide pour l'avenir.
M. RAFFIN.- Le point n° 4 porte sur les opportunités, notamment en matière d'emploi. Nous voulions que le partage soit équitable entre les deux compagnies aériennes.
M. SCHMID.- Ce sont les points fondamentaux. Dans les autres éléments constitutifs de cet accord, il y a un certain nombre de concepts simples qu'il nous a semblé important d'inclure.
Par exemple, l'échange. Tout d'abord, établir une bonne relation, un échange d'informations, un retour d'expérience, un partage des connaissances au niveau des pilotes mais également avec les techniciens au sol, les mécaniciens. L'idée, c'était de s'informer et d'échanger au maximum.
M. RAFFIN.- Nous avons également entrepris un travail de benchmark, de comparaison des contrats entre pilotes néerlandais et pilotes français. Cela nous a permis de nous organiser pour les négociations futures.
M. SCHMID.- Il fallait éviter encore une fois l'affaiblissement de notre capacité à négocier. Un protocole comme celui-là était très important à cet effet. Avoir cette force de négociation, cela vous permet de rester en position de force et d'avoir une véritable négociation avec l'employeur.
M. RAFFIN.- S'est posée également la question de coopération et d'assistance mutuelle. Nous avons cherché à organiser des réunions de manière régulière. Très rapidement, nous avons compris qu'il était important de bien se connaître non seulement pour mieux travailler ensemble mais également pour ne plus se craindre. C'est quelque chose qui a fini par payer, quelques années après.
M. SCHMID.- Échanger de manière régulière, se rencontrer fréquemment que ce soit à Paris ou à Amsterdam, à différents niveaux. Travailler également sur des plans tels que Transform, par exemple. Certains de ces points figurent dans le protocole. L'idée, c'est que les entreprises connaissent et reconnaissent les accords et les protocoles que nous rédigeons. C'est très important. Il est important d'avoir ce type d'accord vis-à-vis des membres, il faut véritablement que ce soit quelque chose de contraignant.
M. RAFFIN.- Le point n° 7 est un point assez nouveau : il faut respecter ce qui avait été fait précédemment, à savoir respecter le fait que les différents groupes de pilotes avaient déjà des accords en vigueur, sans pouvoir faire table rase de ces accords. En même temps, nous souhaitions aller de plus en plus vers quelque chose de plus homogène entre nos différents contrats.
M. SCHMID.- Le point suivant concerne l'entraide, en matière d'action sociale notamment. Evidemment, si un groupe de pilotes décide de lancer une action, il s'agit de ne pas prendre une position différente qui pourrait avoir un effet préjudiciable sur cette action de l'autre groupe. Ce n'est pas une chose aisée.
M. RAFFIN.- Je vous rappellerai qu'en France, nous avons une culture de conflit. Ce n'était pas simple pour nous de l'accepter et ce n'était pas facile pour les Néerlandais de l'accepter. C'était difficile pour eux de comprendre comment nous fonctionnons. Je pense que par contre les relations sociales à notre niveau ne sont peut-être pas non plus tout à fait assez matures pour imiter ce type de comportement.
Les deux derniers points ne sont pas forcément les plus importants mais je les cite quand même : la mise en place de l'organisation et notamment, la mise en place de groupes de travail. Je pense pouvoir dire aujourd'hui que nous avons respecté ces engagements et de manière assez rapide.
M. SCHMID.- Ces groupes de travail ont fonctionné pendant deux ou trois ans, je pense et grâce à eux, nous avons pu échanger énormément. Nous avons appris à nous connaître, à connaître nos différents contrats, à connaître nos différentes cultures. Au final, cela a amené à un deuxième protocole, qui a été signé à Paris, en juillet 2007. Ce deuxième protocole comporte des éléments plus précis sur notre collaboration.
M. RAFFIN.- Si vous regardez le titre, en anglais, nous l'avons appelé "fence agreement". Je pense que cela reflète la position des deux syndicats de pilotes.
Les deux entreprises travaillaient ensemble, à l'époque. Un certain nombre de synergies étaient organisées. Nous souhaitions garder deux divisions opérationnelles, donc, deux entités opérationnelles, tout en anticipant que, pour des raisons X ou Y, ces deux départements opérationnels pourraient très bien fusionner.
M. SCHMID.- C'est ce que vous retrouvez d'ailleurs dans le préambule. Que se passerait-il si une intégration plus importante avait lieu entre les deux compagnies aériennes ? L'idée est de séparer les deux entreprises en permettant aux deux de travailler au mieux.
M. RAFFIN.- Dans la deuxième partie, les deux groupes de pilotes ont considéré que les entreprises continuaient à être des compagnies aériennes distinctes et non pas complètement fusionnées. Donc, les syndicats distincts peuvent négocier avec leur entreprise, avec leur compagnie de manière collective.
Depuis la signature, nous avons pu benchmarquer et nous savons que même si nous travaillons de manière distincte, nous travaillons dans le même sens.
Autre point important dans ce chapitre : les ratios. En 2004, les deux entreprises se sont rapprochées. On a fait une photographie des tailles de KLM et d'Air France. Ensuite, on a demandé à l'entreprise, avec des ratios, de conserver la dimension relative des entreprises, à l'avenir. On ne voulait pas se retrouver avec une entreprise qui connaisse une croissance sur le dos de l'autre.
Nous avons développé la politique d'assistance mutuelle, évoquée dans le premier protocole. L'idée était simplement de ne pas prendre le travail de l'autre en cas de litige.
M. SCHMID.- On le retrouve, ici : conserver la dimension relative d'Air France et de KLM, avec une marge de manœuvre qui existe, qui est accordée mais l'idée, c'est qu'au niveau des ASK et des heures, des kilomètres fret également, que ces paramètres soient en fait calculés, suivis. Pour les vols entre la France et les Pays-Bas, il devait y avoir un partage 50/50, tout simplement. Le dernier point concerne le domestique, très étroitement lié au transport long-courrier évidemment. L'idée, c'est que là encore, la dimension du marché domestique soit conservée.
M. RAFFIN.- C'était un processus assez complexe aux Pays-Bas, puisqu'il n'y a pas de marché domestique. En France, au contraire, il y avait un marché domestique. C'était très difficile pour nous de trouver un arrangement. Je reconnais que rétrospectivement, il aurait fallu développer beaucoup plus les choses mais à l'époque, nous en sommes restés là.
M. SCHMID.- Les préparatifs pour l'intégration opérationnelle. Encore une fois, nous avions deux entreprises, deux groupes de pilotes mais les choses pouvaient être appelées à évoluer, à être modifiées. Quels seraient les éléments déclencheurs des procédures d'intégration opérationnelle, les process, les procédures notamment en fonction de l'ancienneté ? C'est très difficile lorsque des entreprises fusionnent.
M. RAFFIN.- Imaginez la position de la Direction, lorsqu'on lui a fait part de la préparation de cette intégration opérationnelle. Ce sont les pilotes Air France qui volaient sur des appareils KLM et on a dit que nous n'accepterions pas de pilotes français au départ d'Amsterdam ou de pilotes néerlandais au départ de Paris (chose envisagée par un certain nombre de dirigeants à l'époque).
M. SCHMID.- La troisième liste : nous avions notre propre liste d'ancienneté. À partir d'octobre 2005, il y avait eu une deuxième liste sur le fonctionnement de laquelle nous avions un certain nombre d'idées. Il y avait deux listes séparées et une troisième liste, qui rendrait les choses plus simples, si une fusion devait avoir lieu. Donc, les modalités de cette troisième liste ont été établies par le protocole. Cette troisième liste est d'ailleurs contraignante et le sera en cas de fusion complète.
M. RAFFIN.- Quel est l'intérêt de ce type d'accord ? A mon avis, ce type d'accord, du point de vue des pilotes et des catégories de personnel, protège les activités dans les deux compagnies. Que ce soit les personnels au sol, les navigants, le personnel technique, on s'assure qu'il n'y a pas d'externalisation de la main d'œuvre.
M. SCHMID.- Cela permet d'éviter l'externalisation de la main d'œuvre et une espèce d'appel au moins disant qui amène un nivellement par le bas. Si nous voulons obtenir des accords, il nous faut nous assurer que nous travaillons ensemble. Du point de vue des compagnies, il y a également des points positifs dans ces accords.
Tout d'abord, non seulement, cela donne une garantie de paix sociale mais c'est également un outil de négociation avec d'autres partenaires, comme par exemple la joint-venture transatlantique.
M. RAFFIN.- Il y a un autre dernier point, qui n'est pas sur cette diapositive, c'est que cette démarche a été très intéressante dans la manière où nous avons fait avancer les questions syndicales. Nous avons beaucoup appris en traitant au niveau mensuel avec nos homologues néerlandais, avec nos homologues américains. Donc, c'était une démarche extrêmement intéressante et nous avons été extrêmement satisfaits de travailler ensemble.
Contact email : wilhelmw.schmid@vnv-dalpa.nl
Résumé du débat